Vianney le savait, malgré lui, il n'avait jamais pu s'empêcher de considérer le saut à la perche comme quelque chose d'un peu métaphysique. Cette barre, là-haut, avait-on idée d'ailleurs, c'était un peu la représentation de tous ses rêves à la fois. De ceux qu'il faut se donner les moyens d'aller décrocher, ceux qu'on se doit d'aller chercher. Combien de fois ne s'était-il pas envolé vers eux, le corps propulsé, la détente maximale. De tout son élan, de tout son coeur. Il avait cru, parfois, les atteindre, au sommet de son ascension, douté, aussi, fermant les yeux pour ne pas voir, pour ne pas savoir, s'il allait les frôler, ses rêves. Quand la barre commençait à chanceler, lui, parvenu à cette fraction de seconde où le corps ne s'élève plus mais n'a pas encore amorcé la chute pour autant, cette fraction de seconde où il lui semblait alors planer, où il lui semblait voir défiler des heures, il avait le temps de se demander si c'était ses rêves, qui allaient s'effondrer. Il avait mis trop d'images derrière cette barre, trop de symboliques, et au fond, cela n'avait jamais été qu'une simple barre à passer. Cela avait toujours été davantage.
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