J'ai deux amours, Roland Garros et les Serres d'Auteuil

Aujourd'hui je publie cet article tout à fait hors saison pour me replonger dans cette balade de la fin octobre, qui marquait de jolies retrouvailles avec le Paris que j'aime.

Je me souviens que j'avais eu envie de me promener dans tous les jardins de la ville, boycotter les voitures, boycotter le bitume, simplement passer de jardin en jardin et faire une overdose de feuilles d'automne. 

De cette idée fixe, est née mon envie de découvrir le jardin des Serres d'Auteuil car, étonnamment, je n'y avais encore jamais posé le pied. 
Ces serres, je les ai très souvent longées, chaque fois que je me suis rendue à Roland Garros, mon vrai plaisir du mois de mai-juin, que j'essaye de vivre le plus souvent possible, année après année. Chaque fois je me suis dit que tout de même, il faudrait que je revienne pour les Serres, et comme beaucoup de promesses que je me fais, celle-ci était restée  suspendue jusqu'à cette fin octobre 2015. 

Là, il y avait ce doux début d'automne qui me soufflait que c'était le bon moment. Je savais d'avance que les couleurs y seraient belles, et j'avais lu tellement d'informations contradictoires concernant leur potentielle destruction (démontage ?) prochaine due au projet d'extension de Roland Garros, que je voulais voir tout cela de mes propres yeux. Je voulais voir ces Serres classées, les voir se dresser belles et grandes devant moi, avant qu'on y touche. 

J'y suis allée comme pour jauger leur proximité avec les courts de tennis voisins, pour comprendre les colères des uns, les projets des autres. J'y suis allée très naïvement, comme quelqu'un qui voudrait réconcilier deux personnes chères à son coeur. 

Moi je l'aime bien tout petit qu'il est, Roland Garros. C'est pas grave qu'ils soient deux fois plus grands, les autres tournois, c'est pas grave, je m'en moque, moi. Et puis, je suis certaine que là-bas, ailleurs, l'argent et la "grosse machine" tennistique ont tout gommé, tout lissé et fait de ces stades des mastodontes froids et impersonnels. 

Je voudrais qu'on ne touche pas un cheveu aux Serres d'Auteuil. J'ai mis des années à découvrir cet endroit exceptionnel, dont je repoussais la visite comme pour mieux la savourer le jour où enfin...

Je voudrais aussi qu'on ne touche pas un cheveu au Court n°1 de Roland Garros, car lui aussi, on voudrait le détruire, comme les Serres. Il est un peu vieillot c'est vrai, un peu petit, oui mais il a du charme, et j'y ai vu jongler, oui, jongler Mansour Bahrami, et je trouve que c'est déjà un sacré argument.

Moi je la trouve prodigieuse, cette cohabitation entre ces Serres classées et ce stade mythique. Ils sont tous les deux chargés d'Histoire et d'histoires, tous les deux drapés d'une atmosphère que n'ont peut-être pas saisi tous les acteurs politiques et économiques. Je les aime tous les deux, alors je voudrais qu'ils s'entendent bien. 

Après tout, d'accord, chers messieurs en costume, je veux bien que vous ajoutiez un toit sur le Court Central de Roland Garros, parce qu'en cherchant dans mes souvenirs, c'est vrai que je n'avais pas trop aimé me transformer en chien mouillé pendant que Rafaël Nadal soulevait son trophée sous une pluie battante, il y a quelques années. D'accord, construisez un toit. 

Mais ensuite, ensuite tombez la veste, retirez votre cravate et allez vous balader. Marchez dans les allées de Roland Garros, allez regarder la liste de tous les gagnants du tournoi depuis 1928, ils sont gravés dans la pierre. Sortez, ensuite, longez l'avenue Gordon Bennett et visitez le jardin des Serres d'Auteuil. Respirez, écoutez.
C'est la même atmosphère qui enveloppe ces deux lieux. 

Alors s'il vous plaît, moi je ne vous demande qu'une chose, c'est de ne pas m'obliger à choisir.