jeudi 15 septembre 2022

Premiers travaux avec la technique du cyanotype

Il y a quelques mois, profitant du calme un peu retrouvé de l'été, j'ai tenu à explorer de nouvelles pistes créatives dans ma pratique. 

Pris.e dans le rythme des créations et des priorités, le reste de l'année, il est si facile, en tant que créateur.rice, de ne pas prendre suffisamment de temps pour mettre sa propre pratique créative en question. J'ai pourtant bien conscience de ce que cela peut être essentiel pour avancer, rester enthousiaste face à ce qu'on crée, et ne pas s'enfermer dans des schémas. 

Fidèle à mon attrait pour les procédés d'impression anciens, comme je l'ai fait il y a quelques années avec la linogravure, j'ai cette fois-ci mis l'été à profit pour explorer la technique du cyanotype

la technique du cyanotype - Marion Romain


Qu'est-ce que le cyanotype ?


Origine et principe

Le cyanotype est une technique d'impression photographique mise au point au XIXè par la botaniste britannique Anna Atkins. 

Il se caractérise par les impressions monochromes qu'il permet d'obtenir à partir d'une réaction chimique  et d'un mélange photosensible à la lumière UV, allant du bleu de Prusse au bleu cyan. 

la technique du cyanotype - Marion Romain

Comment imprimer des cyanotypes ?

Les papiers destinés à être imprimés sont préparés en amont à l'abri de la lumière du Soleil, enduits d'une solution sensible composée à volume égal de ferricyanure de potassium et de citrate d'ammonium ferrique (non toxiques, malgré leur nom qui pourrait le laisser croire). 

Une fois secs, les papiers sont exposés une dizaine de minutes (un peu plus ou un peu moins selon le degré d'ensoleillement) à l'extérieur afin de révéler l'image qu'on souhaite y imprimer. La réaction avec le Soleil se produit en négatif, de telle sorte que toutes les portions du papier exposées à la lumière deviennent bleues, tandis que les parties qui n'auront pas été exposées sont épargnées et restent blanches. Plus l'intensité du Soleil est forte, et puis le temps d'exposition est long, plus les contrastes seront forts à leur tour, et les bleus profonds. Ces couleurs définitives ne sont pas tout de suite révélées à l'issue de l'exposition, mais après avoir plongé le papier dans l'eau pour éliminer toutes traces de la solution photosensible initiale.

Les cyanotypes ont une grande durée de conservation : de nombreux travaux nous sont parvenus datés des  tout débuts de cette technique, et l'on peut noter la présence de cyanotypes dans les musées. Au fil des années, il peut arriver que les cyanotypes perdent un peu de leur éclat (s'ils ont été trop en contact direct avec le soleil par exemple), mais il suffit de les placer quelque temps dans l'obscurité pour qu'ils retrouvent leur vivacité de couleurs.

la technique du cyanotype - Marion Romain

Mon travail à partir de la technique du cyanotype


Premières recherches

Avant d'explorer véritablement la technique du cyanotype, j'en avais l'image de ces impressions d'empreintes de fleurs magnifiques, que l'on a vu croître ces dernières années chez différent.e.s créateur.rice.s. Ces réalisations sont obtenues à partir de véritables végétaux, que l'on vient placer sur la feuille de papier préalablement préparée. Une fois le papier exposé au soleil, on obtient alors de jolies empreintes : toutes les parties composant les végétaux, ayant fait "barrage" à la lumière, restent blanches. 

Si la curiosité vous en dit, j'ai d'ailleurs créé un tableau Pinterest spécialement dédié à ce type précis de cyanotypes. 

J'ai réalisé mes tout premiers essais au cyanotype selon ces procédés, explorant le fruit de mes cueillettes estivales au jardin, les pétales d'hortensias, les enveloppes tout en transparence de la monnaie du pape, les  ramifications aériennes des fleurs de carotte... Ces premiers essais m'ont permis de comprendre le procédé, de mesurer les temps d'exposition nécessaires, de comparer les résultats... puis d'entrevoir les chemins que je souhaitais prendre pour m'approprier cette technique de façon vraiment personnelle

Aboutissements

Si la technique du cyanotype me tentait, j'avais surtout à coeur de trouver une manière de faire entrer ce procédé en cohérence avec mon univers créatif, et de me demander si lui et moi avions des choses à nous dire, à nous apporter sur ce terrain-là. 

la technique du cyanotype - Marion Romain

Quand je plonge de façon sérieuse dans une nouvelle technique, j'essaye généralement d'y trouver une complémentarité avec les autres techniques que je pratique, notamment la broderie libre et la linogravure. Ces deux techniques ont leur propre langage, leurs avantages, leurs limites. Par exemple, quand je dessine dans le but de réaliser une broderie ou une linogravure, les traits de mes dessins se passent de nuances, d'ombres, de "valeurs" : une fois passée l'étape du brouillon, ils se font nets et précis pour pouvoir être ensuite brodés, loin du croquis initial.

la technique du cyanotype - Marion Romain

A travers le cyanotype, j'ai rapidement réalisé que je pouvais trouver là un terrain d'expression faisant de la place à mes dessins plus traditionnels, où les ombres garderaient leur place sur le rendu final. Mieux, j'y ai trouvé une manière de faire interagir plusieurs de mes passions : le dessin de personnages, la photographie, et même le voyage. 

Plutôt que de travailler à partir d'empreintes de fleurs, j'ai donc exploré le cyanotype en tant que procédé d'impression photographique. Et c'est ainsi que sont nées les trois premières séries sur lesquelles j'ai travaillé.

Premières séries de cyanotypes 

Mes trois premières séries de cyanotypes s'organisent autour de trois piliers constants de mes inspirations, quels que soient le support et le médium que j'utilise : les fleurs, les personnages et toute la forme évocatrice que peut générer le travail autour des corps et des âmes. Et les ailleurs, ceux que j'aime photographier, qu'ils soient juste là, au pas de la porte, ou un peu plus loin. 

Sont ainsi nées les trois cyanotypes formant la série "Le temps des fleurs"

la technique du cyanotype - Marion Romain

Ici, "Hortensias", "Blue bird", du nom de la superbe variété d'hortensias japonais que j'ai photographiée, et "Cueillette"

Mais aussi la série "Corps et âmes".

la technique du cyanotype - Marion Romain

C'est sûrement celle-ci qui fait le plus de lien avec les silhouettes emblématiques de mes travaux précédents, que ce soit en broderie ou en gravure. Ici, elles rencontrent des fragments de mes photos de fleurs, pour jouer sur ce mélange entre l'illustration et la photographie. 

Ici, "Les pensées s'apaisent par les fleurs", "Bleu septembre", et "Brins d'été"


la technique du cyanotype - Marion Romain

Et enfin, une porte ouverte au voyage avec la série "Ici et là"

Ces petits formats, aux tons surannés, ont été pensés un peu comme des photographies anciennes, grâce aux bains végétaux dans lesquels ont été plongés mes cyanotypes après leur impression. 

Pour ces trois premiers modèles, j'ai choisi des lieux et/ou des souvenirs qui me sont chers : "le phare de Beachy head", sur la côte anglaise, entre Eastbourne et Seaford, souvenir bien ancré d'un voyage saisissant en Angleterre - le phare breton de la Perdrix, dans mon Finistère, avec son célèbre motif damier - Ces deux modèles sont également finalement brodés au fil doré -  Et enfin, cet envol merveilleux de mouettes surpris à Cais do Sodré, à Lisbonne. 

la technique du cyanotype - Marion Romain

C'est avec ces chemins nouveaux que j'ai souhaité que ma boutique fasse sa rentrée il y a quelques jours. Ils y sont disponibles dès maintenant. 

Ces travaux ne signent pas la fin de quoi que ce soit, bien plus une continuité. Et je suis heureuse de savoir quelques-uns d'entre eux déjà en route vers les premières personnes à m'avoir fait confiance. 

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